"Dronification" de la sécurité : Delta Drone avance ses pions

A l’issue de plusieurs années marquées par des croissances externes, le groupe lyonnais Delta Drone vient d’être sélectionné, par le biais de sa filiale ATM Group Sécurité, par le Ministère de la Justice pour assurer la gestion de la sécurité de 10 tribunaux situés en Rhône-Alpes à compter de janvier 2021. S’il ne s’agit pour l’instant que d'un contrat pour la fourniture d'agents de sécurité, le groupe se tient prêt à déployer ses drones pour accompagner les prochaines évolutions du secteur.
Des preuves de concept, basées sur les systèmes de drones automatiques et filaires (ISS Spotter) de Delta Drone, seraient actuellement réalisées pour le compte de grandes entreprises, de services de l'Etat et de collectivités.
Des preuves de concept, basées sur les systèmes de drones automatiques et filaires (ISS Spotter) de Delta Drone, seraient actuellement réalisées pour le compte de grandes entreprises, de services de l'Etat et de collectivités. (Crédits : DR)

La sécurité de 10 tribunaux en Auvergne Rhône-Alpes passe dans les mains de Delta Drone. Et peut-être bientôt, sous l'œil de ses drones, espère Christian Viguié. Si le contrat actuel de 6 millions d'euros passé avec l'institution judiciaire -dont 2 millions correspondent à des activités de renouvellement-, fait état de la fourniture d'agents de sécurité jusqu'en 2025, le fondateur du groupe espère bien mettre à profit ces quatre années de contrats pour se pré-positionner sur un marché qu'il estime porteur. Celui de la « dronification » du secteur de la surveillance, comme il le nomme.

Et pour cela, le groupe lyonnais -né d'abord à Grenoble-, s'est préparé à coups d'acquisitions et de consolidations depuis plusieurs années. Car avec ses 460 salariés pour un chiffre d'affaires de 20 millions d'euros en 2019, ce spécialiste des drones civils à usage professionnel regroupe plusieurs filiales, sur lesquelles il peut compter pour développer de nouveaux marchés.

Avec, parmi elles, ATM Group Sécurité, un établissement basé en Isère, et issu lui-même de la fusion en décembre dernier des sociétés Aer'Ness Security et ATM Group Sécurité, toutes deux filiales de Delta Drone. Une alliance qui visait déjà, à l'époque, à marier les compétences d'un spécialiste de la sécurité privée traditionnelle avec des « services associés » déjà présents au sein du groupe.

Pour adresser le marché de la sécurité, et accompagner ainsi le développement de nouvelles technologies comme les drones, Delta Drone voulait d'abord capitaliser sur une expérience de plus de 15 ans dans le secteur de la sécurité, que lui confère sa filiale ATM Group Sécurité. « Ni l'une ni l'autre de ses sociétés ne font du drone, mais sont plutôt tournées vers la sécurité privée traditionnel à travers la mise à disposition d'agent de sécurité ».

Un axe de plus en plus stratégique pour le groupe

Mais alors que cette branche de la sécurité pèserait désormais près de 50 % du chiffre d'affaires du groupe Delta Drone -contre 25% pour le domaine minier, 12% pour la logistique, 8% pour la formation notamment-, ce dernier a déjà une ambition : faire croître encore le poids de cette activité stratégique d'ici les prochaines années.

« Nous avons globalement une vision qui consiste à dronifier des métiers traditionnels, c'est-à-dire à y introduire de la technologie, en partant du principe que cette technologies ne se substituera pas brutalement à des pratiques anciennes », indique Christian Viguié.

Son idée est plutôt en effet de proposer ses produits comme une « solution complémentaire », en mesure de répondre aux besoins de certains marchés de niche, comme celui de la sécurité. « On sait déjà que dans ce domaine, il existe trois niveaux de surveillance : à savoir des agents sur le terrain, de la vidéosurveillance fixe, ainsi que de la vidéosurveillance mobile. Ces technologies sont déjà complémentaires, ne remplace pas l'humain qui est toujours là pour surveiller lui-même en les utilisant », explique le pdg.

Alors que Delta Drone dispose déjà de systèmes commercialisables et opérables sur le terrain, grâce au rachat des sociétés Pixiel et Drone Protect System (DPS), ainsi que des activités de sa filiale de drone filaire Elistair, son prochain objectif sera donc de convaincre de l'utilité d'insérer des drones au sein de nouveaux marchés. Pour cela, il a créé récemment une nouvelle filiale avec la société israélienne Parazero, qui dispose déjà d'une gamme complète de systèmes de sécurité pour drones homologuée aux Etats-Unis par la FAA.

Mais en attendant de pouvoir viser l'export, le groupe compte déjà capitaliser sur les forces de sa dernière génération de drones. Avec, d'un côté, une offre composée de drones professionnels automatiques, décollant d'une station d'accueil pour voler de manière automatisée, au sein d'un espace préalablement décrit. Mais aussi, de l'autre, de drones filaires, qui permettent de déployer une vision plus large grâce à leur position stationnaire dans les airs.

Les drones filaires, nouvel eldorado de la sécurité ?

Et c'est justement sur ce segment que Christian Viguié entend bien proposer de nouvelles offres au marché de la surveillance. « Les drones filaires offrent un angle de vue de 360° en hauteur et permettent ainsi d'avoir une meilleure surveillance des lieux publics, d'un événement, d'une foule ou d'un parc de voitures », affiche-t-il.

Autre avantage selon lui ? Contrairement aux caméras de surveillance, les drones filaires sont par définition des dispositifs mobiles, pouvant être déplacés au sein de différents lieux en fonction des besoins. « Il devient donc possible de couvrir avec un même drone plusieurs établissements, et de mobiliser ces appareils en fonction de la tenue de grands procès ou d'événements à risques, si l'on prend l'exemple du domaine de la sécurité », avance-t-il.

Des systèmes déjà expérimentés par la préfecture de police de Paris, lors de la Ryder Cup, qui avaient permis aux postes de commandement de mieux réguler le trafic des véhicules et des personnes aux abords de l'événement. L'an dernier, Delta Drone avait aussi déployé, pour le compte des organisateurs du Festival de Cannes, un drone filaire au-dessus de son festival Les Plages électroniques, afin de surveiller les mouvements de foule durant trois nuits.

« Pour l'instant, le présent contrat que nous avons passé avec une dizaine de tribunaux de la région ne concerne que de la sécurité privée traditionnelle, mais d'ici son échéance, nous avons tout le temps de convaincre nos partenaires que nos solutions peuvent être une bonne idée », confirme Christian Viguié.

Les yeux rivés vers la Coupe du Monde de Rugby et les JO de Paris

Car « si tout va bien » comme l'indique le PDG de Delta Drone, de grands événements comme la Coupe du Monde de Rugby en 2023 ainsi que les JO de Paris en 2024 pourraient lui donner à nouveau l'occasion de faire ses preuves.

« Avec l'usage grandissant des technologies ainsi que leur banalisation, il est probable que d'ici là, la chancellerie aura moins de réticences à imaginer l'utilisation de tels outils », parie le pdg. D'autant plus que des preuves de concept, basées sur les systèmes de drones automatiques et filaires (ISS Spotter) de Delta Drone seraient actuellement réalisées pour le compte de grandes entreprises, de services de l'Etat et de collectivités, avec toujours le même objectif : « démontrer l'intérêt de moyens combinés de sécurité privée ».

Bien conscient cependant des débats éthiques et juridiques qui résultent toutefois encore de l'utilisation de ces nouveaux produits au sein de la sphère publique, le pdg de Delta Drone reconnaît : « il existe bien sûr des débats et des difficultés à soulever. Mais une première solution serait déjà d'intégrer progressivement de l'intelligence artificielle dans le traitement de nos images, afin de pouvoir flouter et masquer celles qui ne seraient pas en cohérence avec le but recherché ». Et d'ajouter : « Si jamais certaines images devaient être archivées, elles le seraient de toute façon par les autorités ».

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