Rhône Pour Vrac, bien se nourrir est l’affaire de tous

Partie de Lyon début 2014, l’association Vrac, coopérative d’achat en commun, vend des produits bio ou issus de l’agriculture paysanne aux habitants de quartiers populaires, à prix coûtant. L’initiative, qui renforce aussi le lien social, a depuis été dupliquée dans 8 autres villes de France.
Valérie BRUNO - 20 janv. 2021 à 06:00 | mis à jour le 20 janv. 2021 à 10:51 - Temps de lecture :
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Boris Tavernier, directeur de Vrac, ici dans l’entrepôt de Vaulx-en-Velin : « Le souci est toujours de toucher des familles éloignées de cette offre de consommation. »  Photo Progrès /Joël PHILIPPON
Boris Tavernier, directeur de Vrac, ici dans l’entrepôt de Vaulx-en-Velin : « Le souci est toujours de toucher des familles éloignées de cette offre de consommation. » Photo Progrès /Joël PHILIPPON

Les premières distributions de 2021 sont prévues pour fin janvier et certains adhérents de Vrac ne la manqueraient sous aucun prétexte. Car au-delà des produits bio ou issus de l’agriculture paysanne qu’elle vend à prix coûtant, chaque mois, l’association née à Lyon propose bien davantage. Et ce petit plus qui procure du lien social ne peut se coucher sur une liste de courses. Car c’est bien, aussi, ce contact avec les autres que les habitants viennent chercher lors des distributions de produits alimentaires ou ménagers ; cette petite cerise (bio) sur le gâteau que chacun vient croquer.

Pour Boris Tavernier, le directeur de Vrac (Vers un réseau d’achat en commun), tout est lié. Le projet de l’association est orienté vers l’accès du plus grand nombre à des produits de qualité à prix bas, grâce à la réduction des coûts intermédiaires : il permet de proposer, aussi, un autre rapport à la consommation, à la santé et à l’image de soi.

« Que les gens aient le choix »

Lors de la création du concept d’abord à Lyon 9e (avec Est Métropole Habitat et l’agence Rhône-Alpes de la fondation Abbé-Pierre), Boris Tavernier, qui avait sur son CV la création du bar coopératif « De l’autre côté du pont » à la Guillotière (Lyon 7e), fait un constat : celui de la double peine de quartiers populaires ou de banlieues « au niveau consommation » ; certains sont des déserts alimentaires, offrant peu de d’alternatives aux discounters. « Il faut que les gens aient le choix, puissent consommer comme tout le monde », indique-t-il. Alors, lorsque Vrac veut lancer un groupement d’achats d’habitants sur un territoire – il en compte 14 sur la Métropole de Lyon – l’association veut impliquer les gens et faire tomber le mur de la méfiance, parfois présent au démarrage d’une aventure. « Quand on arrive dans un nouveau quartier, on y passe du temps. On aime bien convaincre par le goût aussi, faire déguster ; après on parle de prix ».

« Un lieu de vie qui se crée »

Et la formule fait souvent mouche. Les habitants s’impliquent dans les groupements, les font vivre. Lors des distributions qui transforment des centres sociaux en épiceries éphémères, la chaleur humaine est palpable : « Au départ, j’y suis allée de façon sceptique », raconte Zaineb, parmi les premières adhérentes du groupement des Noirettes à Vaulx-en-Velin, « j’ai goûté les produits, les prix sont très intéressants. J’ai été séduite par l’idée, la qualité, les circuits courts. Je suis impliquée, on fait appel aux adhérents pour la distribution. À chaque fois, c’est un lieu de vie qui se crée. On échange, on parle de recettes… ». Au-delà des produits, Marie-Hélène, adhérente pour la 4e année au groupement de Vénissieux, met en avant « une organisation qui permet de rencontrer les habitants du quartier et de brasser les populations ». Précieux à ses yeux.

Sur le Rhône, Vrac compte 1 200 familles adhérentes. Pour les habitants des quartiers prioritaires, l’adhésion annuelle est libre, à partir de 1 €. Pas de panier moyen ni de rythmes de commandes imposés, « ils choisissent les produits dont ils ont besoin ». Un maximum de 30 % d’adhérents extérieurs est autorisé, qui paient l’adhésion et les produits plus chers (10 % supplémentaires à l’achat par exemple). « Le souci est toujours de toucher des familles éloignées de cette offre de consommation », ajoute le directeur, qui organise chaque année des temps forts, comme des concours de cuisine ou des sorties chez les producteurs ; des événements fédérateurs.

Lorana Vincent, responsable des groupements Vrac de la Métropole, Léa Thévenot, chargée de mission et Boris Tavernier, directeur de l’association.  Photo Progrès /Joël PHILIPPON

Le concept s’étend dans l’Hexagone

L’association Vrac, qui compte 5 salariés dans le Rhône, est présente dans 8 autres villes de France, dont Paris. Des associations indépendantes selon Boris Tavernier, le fondateur, qui ont leur propre gouvernance. Elles impliquent, comme à Lyon, des acteurs locaux, comme les bailleurs sociaux et la fondation Abbé-Pierre. Vrac compte une centaine de références de produits nationaux disponibles à la commande puis chaque structure, au niveau local, est en lien avec des producteurs du secteur. « On va privilégier les fermes, les Gaec », relève Boris Tavernier, qui évoque une vingtaine de salariés au national. Les produits achetés sont revendus à prix coûtant. Vrac fonctionne par ailleurs avec des financements publics et privés ; des dons de particuliers… L’État est impliqué depuis 2019 : « Cela montre que cela bouge sur cette question de l’alimentation de qualité », poursuit-il. « C’est un choix politique que de rendre accessible l’alimentation ; c’est un investissement plus qu’un coût ». Vrac va poursuivre son maillage en 2021 en s’implantant à Lille et Marseille, mais aussi en zone rurale dans la Drôme. Un projet devrait voir le jour localement à Lyon 8e  : il s’appuiera notamment sur des jardins solidaires et un restaurant solidaire. « On va le construire avec les habitants ». En discussions également en 2021, au niveau de la Commission européenne, la question de possibles financements qui pourraient permettre à Vrac de développer son concept en Espagne, en Suède et en Pologne.

V. B.

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