Interview. Najat Vallaud-Belkacem en croisade contre la "politique catastrophique" de Laurent Wauquiez

Najat Vallaud-Belkacem poursuit sa campagne pour tenter de détrôner Laurent Wauquiez à la tête de l'Auvergne-Rhône-Alpes. Elle a accepté de répondre aux questions d'Actu Lyon.

Après l'avoir été arrêtée pendant quelques jours pour cause de Covid-19, Najat Vallaud-Belkacem a repris sa campagne tambour-battant.
Après l’avoir été arrêtée pendant quelques jours pour cause de Covid-19, Najat Vallaud-Belkacem a repris sa campagne tambour-battant. (©LD / Actu Lyon)
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Ce vendredi 15 avril 2021, l’ancienne ministre Najat Vallaud-Belkacem était de retour en campagne électorale sur ses terres lyonnaises en vue des élections régionales de juin. Entre deux visites au Sporting club de Lyon (anciennement l’AS Duchère) et à Saint-Fons, elle nous a accordé un rapide entretien, juste le temps du trajet. L’occasion de survoler son début de campagne et d’évoquer l’avenir, encore pavé d’incertitudes. 

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Quelles idées pour faire tomber Laurent Wauquiez ? 

Actu : Pourquoi cherchez-vous à revenir sur le devant la scène politique après quatre ans de retrait ?

Najat Vallaud-Belkacem : Ce n'est pas sur le devant de la scène que je veux revenir, c'est plutôt dans l'action politique, dans l'engagement, et pas dans le commentaire d'ailleurs.
Cela fait quatre ans que j'observe le pays, le monde au travers de mes différentes activités (elle a été directrice des affaires publiques internationales au sein d'Ipsos puis directrice pour la France de l'ONG de solidarité internationale ONE, NdlR). Pendant ces années, j'ai conforté ma vision du monde, j'ai vu encore plus à l'œuvre les dysfonctionnements qui nous reviennent en boomerang en France. En étant observatrice de tout cela, je ne pouvais pas rester simple spectatrice de ce qu'il se passait dans notre paysage médiatique à nous. Cette élection régionale m'a semblé la bonne échéance pour porter un discours, des valeurs face à la présidence sortante qui représente la quintessence de ce que je combat en politique. 

Justement, on a le sentiment que vous vous présentez davantage pour faire tomber votre ennemi Laurent Wauquiez que pour présider la région en elle-même...

NVB : Si on est satisfait de la façon dont la collectivité régionale est gérée, pourquoi se présenter ? Or, je ne suis absolument pas satisfaite de la façon dont elle est gérée, je trouve même que c'est une catastrophe. C'est donc pour cela que je viens présenter autre chose. 
Je trouve comme citoyenne qu'on n'entend pas parler de la politique de Laurent Wauquiez. Il faut d'autant plus en parler que le président sortant manie très bien les outils de communication, introduit très bien la confusion dans les esprits. Les acteurs et les habitants ne savent absolument pas ce sur quoi une région peut intervenir ou pas. Il peut faire croire qu'il a été vertueux ces derniers années quand moi je dis que sa gestion a été catastrophique. 

Pour le battre, il faudra présenter des idées et arrêter d'être uniquement dans le duel avec lui.

NVB : Je commence à en donner des propositions. S'agissant de lutter contre les déserts médicaux, nous soutiendrons l'ouverture de centres de santé de telle sorte que pas un seul habitant de cette région ne soit à plus d'un quart d'heure d'un soignant.
Je reproche beaucoup à monsieur Wauquiez d'avoir totalement désinvesti la question de la formation professionnelle et donc d'avoir occasionné des pertes de chance pour les habitants qui veulent se reconvertir ou trouver un CDI. En six ans il a fait moins de 100.000 entrées en formation, moi j'annonce que je multiplierai par 5 ce chiffre. Parce que 500.000, c'est le nombre de chômeurs de catégorie A dans la région. Je sais que ce nombre va malheureusement être amené à augmenter avec la crise économique donc pour moi c'est un minimum. 

Nos régions montagneuses ont rencontré des difficultés cette année (interdiction d'ouvrir les remontées mécaniques, faibles chutes de neige), que leur proposez-vous ?

NVB : On a la chance inouïe d'avoir deux chaînes de montagnes, mais elles sont confrontées des difficultés avec le changement climatique et donc j'ai annoncé un plan de 2 milliards d'euros pour accompagner le secteur de la montagne dans la diversification des activités - qu'on ne soit pas dans le seul sport d'hiver - dans la démocratisation de l'accès à la montagne, dans la création d'infrastructures de logements pour les saisonniers mais aussi des "ascenseurs valléens" pour éviter qu'on monte avec sa voiture tout en haut de la montagne. 

Ce vendredi matin, vous étiez auprès du Sporting club de Lyon pour évoquer son action sociale auprès des jeunes, souvent de quartiers défavorisés. Vous semblez mettre un point d'honneur a aider cette génération, pourquoi ?

NVB : On parle de jeunesse parce que je considère que c'est une compétence de la région qui doit être une priorité. Plus encore dans la période actuelle, parce que beaucoup de jeunes sont dans la souffrance. On ne peut pas les laisser livrés à eux-mêmes.
Je vais présenter dans quelques jours le "pacte liberté et émancipation". On doit avancer sur deux jambes. Avec d'une part un bouclier social et sanitaire et d'autre part un pacte d'émancipation avec l'accès à la formation, l'insertion professionnelle, la mobilité. Quand je serai élue présidente, les transports de la région seront gratuits pour les moins de 25 ans les plus précaires.

L'ancienne ministre de l'Education accorde une grande partie de son projet à la jeunesse.
L’ancienne ministre de l’Education accorde une grande partie de son projet à la jeunesse. (©LD / Actu Lyon)

Le rassemblement avec les Verts est-il encore possible ? 

Vous insistez sur votre volonté de co-écrire et de collaborer avec les acteurs pour définir quels seront les enjeux du prochain mandat. Pourtant vous faites (presque) cavalier seul maintenant que les écologistes ont refusé de former une liste avec vous pour le premier tour.

NVB : Ça dépend où on met le curseur. L'intérêt de cette discussion et de cette porte, qui reste ouverte d'ailleurs, c'est d'apprendre à se connaître. Et je trouve qu'on a progressé dans notre capacité à réaliser que le rassemblement est quelque chose vers quoi il faut tendre. Pourtant ce n'était pas gagné d'avance, chacun voulant exercer le leadership sur les forces de gauche.
Les contacts ont lieu entre nous. Si on arrive à trouver un terrain d'entente, un partenariat équilibré, on le fera avant le premier tour et sinon on fera le soir du premier tour. 

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Vous pensez donc passer le premier tour sans problème ?

NVB : Bien sûr, il faut 10% des voix pour le passer ! Mais évidemment, ce serait plus simple si l'ensemble de la gauche pouvait être unie. Je suis prête à faire des sacrifices pour qu'on y arrive. Il faut prendre ses responsabilités, faire des choix qui ne sont pas simples. Moi je suis prête à le faire. 

Pendant que vous concentrez vos critiques sur Laurent Wauquiez, le Rassemblement national lui progresse dans les sondages. Cette guéguerre ne fait-elle pas leur jeu ?

NVB : Pour moi c'est tellement évident que l'extrême-droite va soutenir Laurent Wauquiez. Il y a une porosité qui est évidente. Il n'y a qu'à voir la façon dont l'extrême-droite vote quasiment toutes les délibérations proposées à la région. C'est normal que ce soit à lui qu'on s'attaque. 

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La semaine dernière, le journal Numerama a révélé qu'un tiers des candidats à l’élection régionale en France avaient vu leur page Wikipedia "caviardée" ces derniers mois. La vôtre entre autres a été modifiée pour mieux valoriser votre travail, tandis que le même auteur a apporté des modifications plus critiques sur celle de Laurent Wauquiez. Vous étiez au courant ?

NVB : (Elle rit à l'évocation des ajouts élogieux). Je ne sais pas de quoi vous parlez exactement, je n'interviens jamais sur ma page Wikipedia. Il y a toujours eu des passages sévères et élogieux sans que ce soit justifié. C'est intéressant parce que c'est comme ça qu'on voit à quel point on provoque des passions. C'est ainsi quand on est une personnalité publique, ça correspond à une réalité. Mais je fais confiance aux citoyens pour faire la part des choses et pour privilégier la presse.  

Le Renault Espace qui transporte l’équipe de campagne de Najat Vallaud-Belkacem est arrivé à bon port dans le parc à Victor-Basch de Saint-Fons. « Vous restez avec nous ? » s’enquiert-elle avant de rapidement tourner le dos et saluer le maire et les élus venus à sa rencontre. Nous la quittons ainsi, la tête encore pleine de questions. 

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