Métropole de Lyon. Derrière la « fronde des maires », l’opposition met la pression sur l’exécutif écologiste

POLITIQUE. Parmi les les 59 communes que compte la Métropole de Lyon, 45 maires se rebiffent contre la majorité écologiste, arrivée aux commandes en juillet 2020. Face à des dossiers jugés épineux ainsi qu'une gestion trop "lyonno-centrée" de l'outil métropolitain, ils se disent prêts à aller jusqu'à la saisine, ou même à geler les permis de construire pour se faire entendre. Bruno Bernard, qui a réagi ce mercredi, se dit quant à lui prêt à dialoguer, tout en défendant, de fait, des intérêts métropolitains.
Les 45 maires signataires d'une tribune désormais surnommée la fronde des maires dénoncent une gestion qu'ils jugent trop éloignée des communes au sein de la métropole écologiste. Bruno Bernard a réagi ce mercredi en se disant quant à lui prêt à dialoguer, tout en défendant de fait des intérêts métropolitains.
Les 45 maires signataires d'une tribune désormais surnommée "la fronde des maires" dénoncent une gestion qu'ils jugent trop éloignée des communes au sein de la métropole écologiste. Bruno Bernard a réagi ce mercredi en se disant quant à lui prêt à dialoguer, tout en défendant de fait des intérêts métropolitains. (Crédits : ML)

Le 11 septembre dernier, 44 maires de la Métropole de Lyon ont publié une tribune dans le Journal du Dimanche, avec un objectif : se faire entendre et marquer les esprits.

Car à travers cette tribune, une majorité d'élus (44 maires sur un total de 59 communes comprises au sein du Grand Lyon) souhaitaient se positionner non seulement contre le fonctionnement même de la Métropole de Lyon, héritage d'une loi Maptam qui lui confère un statut particulier de collectivité regroupant à la fois les compétences d'un Département et d'une Métropole sur son périmètre, mais aussi et surtout contre la gestion de la majorité écologiste, arrivée aux commandes il y a un peu plus d'un an.

Et qui porte, depuis sa première année de mandat, la volonté de faire pivoter le modèle jusqu'ici centriste de la ville de Lyon, cultivé par Gérard Collomb et David Kimelfled, vers des marqueurs écologistes à travers différents dossiers : encadrement des loyers, accélération de la zone à faible émissions (ZFE), baisse de la place de la voiture en ville, etc.

Cette prise de position, rapidement surnommée "la fronde des maires", a donné lieu à une conférence de presse de ses signataires ce mercredi 15 septembre, qui ont exposé la nature de leur démarche. Une occasion de démontrer que, bien que très marquée à droite et au centre, cette tribune a aussi très légèrement élargi son socle.

Car le groupe Rassemblement de la droite, du centre et de la société civile qui la porte représente en effet 31 sièges métropolitains (sur 150), dont 12 maires et 13 membres de la commission permanente (sur un total de 43 membres). Et la "fronde" à laquelle on assiste dépasse en effet les frontières de ce groupe, puisqu'en tout, ce sont au total 45 maires qui la signent - un élu, le maire (Divers Centre) de Marcy-l'Étoile, Loïc Commun, s'est même rajouté depuis le 11 septembre dernier -.

Avec dans leurs rangs, une majorité d'édiles issus du Centre mais aussi Divers droite, ainsi qu'une petite minorité qui s'affichent sans étiquette.

"18 mois de très grande frustration"

Pour rappel, la Métropole de Lyon est composée de 59 communes. Elle a un statut de collectivité publique unique en France créé sur mesure. Cela a été rendu possible par la loi Maptam (modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles) en 2014.

Sur son territoire, elle a remplacé la communauté urbaine de Lyon et le département du Rhône et en a ainsi pris les compétences. Parmi elles : l'habitat et le logement, les déplacements, l'aménagement urbain, l'énergie, l'environnement, la voirie, l'eau et l'assainissement, etc. Et c'est justement sur ces compétences que les maires signataires de la tribune se sentent lésés.

Car depuis l'arrivée des écologistes à la tête de l'exécutif, ce sont "18 mois de très grandes frustrations", notamment sur des "sujets très irritants", selon les mots de Philippe Cochet, maire de Caluire-et-Cuire, président du groupe Rassemblement de la droite, du centre et de la société civile.

La mobilité est d'emblée présentée comme le premier point d'accroche entre l'opposition et la majorité. Ce sujet englobe plusieurs dossiers qui sont motifs à tension : la place de la voiture en ville, la circulation, la zone à faible émission, l'expansion des lignes de métro, l'opposition au téléphérique entre Lyon et Francheville...

"On veut plus de structuration et moins de planification idéologique", martèle Véronique Sarselli, maire (Union droite) de Sainte-Foy-lès-Lyon. Par "planification idéologique", la maire fustige l'ambition des Verts de laisser "moins de place pour la voiture" et elle demande un plan de métro élargi. Sur la ZFE les frondeurs déplorent "l'accélération du calendrier."

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Il est aussi reproché à l'exécutif d'avoir peu de maires en son sein et de "rejeter systématiquement [leurs] propositions." Pareil à propos de la PPI (Programmation pluriannuelle d'investissement), qui déçoit ces maires quant aux projets qu'ils portaient pour leurs communes.

Une institution qui ne leur convient plus

Au-delà des différents idéologiques, le 45 maires signataires se positionnent aussi en bloc contre l'institution même qu'est la métropole, et que souhaitait déjà pourtant le centriste Gérard Collomb, qui a constitué un soutien actif de sa constitution.

Un problème structurel qui ne date pas de l'élection des écologistes, reconnaît Alexandre Vincendet, maire LR de Rillieux-la-Pape : "Gérard Collomb avait un rêve mégalo en tête en créant la Métropole". Soit celui de faire une énorme commune avec 59 collectivités.

Avec comme principale revendication, un fait issu de la constitution métropolitaine : "En raison du nouveau mode de scrutin inauguré en 2020 pour les élections métropolitaines à Lyon, seulement 22 maires sur 59 sont également conseillers métropolitains. La Conférence métropolitaine, qui rassemble les 59 maires (ainsi que les maires d'arrondissement), n'est quant à elle qu'une instance consultative - souvent le réceptacle d'informations descendantes de la part de l'exécutif métropolitain", notent les élus au sein de la tribune publiée au sein du JDD.

"Or, la dilution progressive et à bas bruit des communes par la confiscation des pouvoirs aux maires et des compétences aux municipalités ne peut conduire à terme qu'au déracinement de cette Métropole", argumentaient les élus.

Pour Philippe Cochet, "il y a la loi, l'esprit de la loi, et la façon d'exercer un mandat". Si l'institution n'était pas idéale avant, pour ceux qui sont aujourd'hui dans l'opposition, elle arrive à ses limites. "On ne fait pas contre la volonté d'un maire sur une commune", poursuit-il.

"Ils sont majoritaires en siège, mais pas territorialement", abonde Alexandre Vincendet. Sur les 150 conseillers élus au suffrage universel direct, seulement 66 élus sont en effet affiliés à la droite et au centre droit, selon Rue89 Lyon. Pourtant les 45 maires frondeurs représentent "les deux tiers" des communes de la Métropole.

"La loi Maptam on peut en rentrer, mais pas en sortir. Pourtant on ne peut pas forcer des gens à rester ensemble quand ils veulent se séparer", tranche le président du groupe divers droite.

Déterminés à bloquer l'exécutif

Pour se faire entendre, cet ensemble de maires de droite et du centre menace désormais "d'arrêter par exemple de signer les permis de construire", afin de bloquer l'exécutif écologiste en place au sein du Grand Lyon.

Ils annoncent aussi leur volonté d'effectuer une saisine auprès "du Parlement, du Sénat, de l'Assemblé nationale, de l'association des maires de France, du premier ministre, du président de la République et des candidats à la présidentielle"... Tout cela dans l'espoir de faire modifier la loi Maptam, ou à défaut, de faire bouger les lignes.

Ils évoquent aussi la piste de l'ouverture d'une mission d'information menée par le Sénat, à propos de la Métropole de Lyon. "Cette tribune n'est pas un feu de paille, nous nous inscrivons dans la durée. [...] Soit il y a une évolution, soit ça ne se passera pas bien", déclare Philippe Cochet.

En réaction, Bruno Bernard a déclaré ce mercredi matin lors d"une conférence de presse : "Il est naturel que je porte d'abord l'intérêt métropolitain, plutôt que l'intérêt régional ou communal", rapporte l'AFP.  "Ce n'est pas rien que 40 maires s'expriment (...) c'est quand même un fait politique et j'en tiens compte", a-t-il ajouté.

Le président EELV du Grand Lyon a par ailleurs indiqué que sa porte restait "ouverte aux maires pour discuter des dossiers de leur commune mais aussi pour parler de la relation globale. [...] J'espère qu'au-delà des annonces, tout le monde va redevenir très vite raisonnable."

(avec ML)

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