Railcoop : un scénario « accéléré » à l'étude, après l'entrée au capital de la Ville et Métropole de Lyon

La route est longue pour la première coopérative ferroviaire de France, mais elle vient de franchir un nouveau cap symbolique. Presque quatre ans après avoir posé l'ambition de relancer les lignes transversales comme le Lyon-Bordeaux, Railcoop enregistre un soutien de poids, avec l'entrée au capital de la Ville et de la Métropole de Lyon. Une nouvelle qui vient compléter sa levée (en titres participatifs) de 2,8 millions d’euros, toujours en cours et qui envoie de fait des signaux de plus en plus appuyés aux collectivités bordelaises. La coopérative étudierait également un nouveau scénario dit "accéléré", qui sera soumis au vote de ses sociétaires dès février prochain.
Après avoir reporté à deux reprises le lancement de sa première ligne de transport de passagers Lyon-Bordeaux, Railcoop envisage d'accélérer à nouveau en ce début d'année. En marge de l'entrée au capital de la Ville et Métropole de Lyon, un scénario alternatif et accéléré doit être soumis au vote des sociétaires, lors de la prochaine assemblée générale prévue en février.
Après avoir reporté à deux reprises le lancement de sa première ligne de transport de passagers Lyon-Bordeaux, Railcoop envisage d'accélérer à nouveau en ce début d'année. En marge de l'entrée au capital de la Ville et Métropole de Lyon, un scénario alternatif et accéléré doit être soumis au vote des sociétaires, lors de la prochaine assemblée générale prévue en février. (Crédits : Railcoop - Lucas Madebos)

C'est un soutien de poids qui vient se rajouter aux 13.700 sociétaires de Railcoop, particulièrement bienvenu à l'heure où la première coopérative ferroviaire française tente toujours de lever des fonds, en vue de faire renaître des lignes ferroviaires abandonnées à travers l'Hexagone, à l'image de son projet de ligne Lyon-Bordeaux.

Après avoir réuni un capital social de 5,8 millions d'euros, la coopérative basée dans le Lot travaille toujours sur une levée de fonds en titres participatifs (en cours), qui a récolté à ce jour près de 2,8 millions d'euros. Mais le chemin est encore long, puisqu'elle a estimé l'ensemble de ses besoins en financements à une quarantaine de millions d'euros au total, comme La Tribune le rappelait ici. Et ce, dans l'objectif de lancer sa ligne de transport de voyageurs entre Bordeaux et Lyon et d'accueillir à terme 1,4 million de personnes sur cette liaison.

Une somme qui devrait servir notamment à financer l'acquisition de sept autres rames (en plus des deux premières déjà acquises), ainsi que l'aménagement des espaces en gare, une campagne de recrutement et les besoins en fonds de roulement.

L'entrée de la Ville et Métropole de Lyon, une première étape

Pour débloquer la situation, on savait déjà que les quatre conseils régionaux concernés par son tracé pourraient jouer un rôle crucial dans les prochaines semaines, afin de se porter garants des prêts bancaires envisagés au sein du tour financier de la coopérative.

A ce sujet, les choses avancent mais doucement, puisque seule l'Occitanie a pour l'heure donné son accord de principe. Restent donc les régions Auvergne Rhône-Alpes, Grand Est et Nouvelle-Aquitaine, qui n'ont pas encore donné leur feu vert. L'enjeu reste de taille puisque Railcoop compte sur ce soutien pour solliciter, auprès des banques, une enveloppe de prêts de 36 millions, selon son business plan originel.

Mais en cette fin janvier, le projet a passé un cap supplémentaire et symbolique avec l'arrivée de la Métropole et de la Ville de Lyon qui, au terme de plusieurs mois de contact, viennent d'annoncer qu'elles rejoignaient toutes deux le capital de Railcoop.

Les élus métropolitains ont en effet délibéré en faveur d'une entrée au capital de la coopérative, à hauteur de 80.000 euros. Une annonce qui vient par ailleurs abonder le vote, survenu le 15 décembre dernier, du conseil municipal de Lyon qui confirmait lui aussi une participation de 20.000 euros.

« L'entrée au sociétariat de Lyon va nous aider à renforcer nos fonds propres, et nous donne également de nouvelles marges de manœuvre pour avancer, en attendant d'autres financeurs », affirme à La Tribune Alexandra Debaisieux, directrice générale déléguée de Railcoop.

« Ce double engagement vise à faire connaître et crédibiliser un projet ferroviaire d'intérêt général : la relance d'une liaison voyageurs transversale Bordeaux - Lyon via Limoges, abandonnée depuis fin 2012 par la SNCF », estimait elle-même la Métropole de Lyon, dont Railcoop espérait justement depuis plusieurs mois qu'elle rejoigne les premières collectivités sociétaires du projet.

Un message à faire passer à Bordeaux

Une bonne nouvelle pour la coopérative ferroviaire, qui devrait en profiter pour réaliser en premier lieu un nouvel appel du pied à l'attention des deux collectivités, établies à l'autre extrémité de sa future ligne, à savoir la Ville et Métropole de Bordeaux.

« La Ville et Métropole de Lyon montrent toutes les deux le chemin car quasiment toutes les collectivités traversées par la future ligne sont sociétaires ou ont voté une délibération en ce sens, sauf les deux collectivités de Bordeaux et la ville de Limoges », souligne Alexandra Debaisieux.

Et si jusqu'ici, la méthode de calcul, qui consistait à baser le tarif du sociétariat sur le nombre d'habitants avait fait grincer des dents au coeur des métropoles (bien plus peuplées que les territoires ruraux), « il existe une grille, certes, mais les collectivités peuvent nous faire une proposition comme cela a été le cas avec Lyon », nuance la directrice générale déléguée de Railcoop.

La porte semble donc ouverte et le micro tendu à Bordeaux, où la Ville semblerait plus favorable à ce stade que la Métropole...

Mais aussi un scénario d'accélération à présenter aux sociétaires

L'autre retombée, plus indirecte mais néanmoins majeure de cette nouvelle étape s'est traduite par une discussion, amorcée lors du dernier conseil d'administration de Railcoop, en coulisses. Elle consisterait à proposer à ses sociétaires, lors de la prochaine assemblée générale qui doit se tenir en février prochain, un nouveau scénario de mise en oeuvre dite "accélérée" du Lyon-Bordeaux :

« L'idée étant de voir si les sociétaires seraient favorables à un scénario qui consisterait à avancer le plus vite possible, avec les moyens que nous avons aujourd'hui, afin de lancer une offre destinée aux voyageurs en format réduit sur le Lyon-Bordeaux, dès 2024 », glisse Alexandra Debaisieux. Avec l'ambition de proposer au moins un premier service, de manière plus « frugale » que le business plan qui tablait jusqu'ici sur 40 millions d'euros...

Pour autant, les contours de cette nouvelle offre demeurent à déterminer avec les sociétaires. Si ce scénario venait à être entériné par l'AG, il resterait toutefois à Railcoop près de 4,1 millions à lever (sous forme de titres participatifs ou de sociétariat), selon ses estimations, afin de faire rouler au moins un train... Reste cependant à déterminer à quelle fréquence et avec quels services et aménagements intérieurs proposés.

Car pour l'heure, Railcoop peut déjà compter sur l'acquisition de deux rames d'occasion, qui ont été rachetées à la Région Auvergne Rhône-Alpes à « tarif préférentiel », mais dont le prix demeure confidentiel. Ces deux rames ont été confiées aux ateliers ACC pour un audit courant 2022, qui a confirmé leur état d'usure « correct » par rapport aux projections de la coopérative.

« L'ambition est de conserver une rame, qui ne roulerait pas, pour nous servir de magasin de pièces, avec au moins deux autres rames qui circuleraient », glisse la directrice générale. Et cela, en sachant que la coopérative ferroviaire a mis une option sur un total de neuf rames d'occasion, détenues par la Région Auvergne Rhône-Alpes, et qu'elle ne pourra acquérir qu'au fur et à mesure de ses tours de financement.

Pour l'heure, la levée en fonds participatifs hébergée sur Lita est toujours en cours jusqu'en mars prochain, et il n'est pas encore exclu que de nouveaux tours s'ouvrent par la suite sous le même format. Railcoop a par ailleurs commencé à opérer une ligne de fret entre Toulouse et l'Aveyron, sur laquelle elle projette de réaliser 2 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2023, en s'appuyant sur le transport du bois notamment.

Confrontée à la complexité de boucler ses financements, un exercice jusqu'ici inédit pour un monde du ferroviaire tout juste ouvert au champ de la concurrence, Railcoop avait déjà annoncé deux reports du lancement de sa première ligne de transport de passagers, Lyon-Bordeaux.

Lors des débats à la Métropole de Lyon, le groupe Métropole en commun représenté par Laurence Boffet avait notamment pointé le modèle de la coopérative basée dans le Lot : « Après plusieurs retards, le lancement d'une levée de fonds par titres participatifs la rapproche du fonctionnement d'une entreprise classique. On peut s'interroger sur l'émergence d'un concurrent à la SNCF. Cette expérimentation ne peut qu'être soutenue, mais le ferroviaire est un mode lourd et très coûteux qui ne peut fonctionner que dans un système intégré national et européen ».

Railcoop dispose à ce jour d'un capital social de 5,8 millions d'euros, détenu à 80% par des personnes physiques, contre 13% pour des collectivités locales, 6% par des entreprises et associations et 1% par ses salariés.

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