Expressions lyonnaises : l’influence des réseaux sociaux en trois questions

De nouvelles expressions nées sur les réseaux sociaux font désormais partie du langage courant des ados. Mais à quel point TikTok et Instagram influencent-ils les jeunes ? Réponse en trois points.

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© Maïlys Champion

Quels sont les réseaux sociaux préférés des ados ?

D’après un rapport de Médiamétrie sur les habitudes de consommation en ligne sur l’année 2021, les moins de 25 ans demeurent les premiers adeptes des réseaux sociaux avec 55 % de leur temps de surf dédié au social, soit 2 h 07 par jour. Parmi eux, les plus populaires auprès des adolescents, soit les moins de 18 ans, sont Instagram, Snapchat et TikTok. Cette dernière, plateforme chinoise de vidéos courtes, connaît un succès phénoménal depuis quelques années auprès des adolescents, dont elle influence les mentalités et les habitudes d’expression.

Cet article fait partie de notre dossier : Tout comprendre sur l’argot lyonnais

« Il y a par exemple des “trends” TikTok qui sont parfois considérées comme gênantes et qui sont reprises à l’oral », explique savamment Niels, lycéen de 17 ans. Ces « trends », à traduire par « tendances », sont des contenus repris par les utilisateurs et mis en avant par l’algorithme de l’application, généralement destinés à devenir viraux.

« Il y a des expressions venues des réseaux qui restent pendant des périodes, ajoute-t-il, puis disparaissent souvent au bout de quelques semaines parce que la “trend” est passée. » Maintenant, si vous entendez un ado prononcer une phrase sortie de son contexte qui fait glousser ses camarades, vous saurez qu’il y a des chances pour qu’elle provienne de TikTok…

Quelles sont ces expressions qui viennent des nouveaux moyens de communication ?

D’abord, il y a eu les SMS qui ont fait que les adolescents écrivaient sous forme de lettres et d’abréviations. De nombreux mots sont passés du texto à l’oral, jusqu’alors inutilisés dans le langage courant, comme l’explique Dominique Desmarchelier : « Le langage est toujours lié à des situations, des lieux, des moments, il est par nature lié à un contexte social. Aujourd’hui, les adolescents sont imprégnés des formes rapides de communication utilisées sur smartphones. Au départ, il y avait une limitation technique, par exemple un nombre maximal de caractères par SMS ou par Tweet. Puis cette limitation technique s’est transposée de l’écrit à l’oral. »

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Pour corroborer les propos du linguiste, Olivier Revol remarque également en sa qualité de pédopsychiatre au CHU Femme, Mère, Enfant de Bron ces changements : « La génération Z est profondément marquée par les nouveaux outils de communication. Ces expressions traduisent aussi, dans la bouche de ces jeunes, une recherche particulière du calme et de la sérénité, moins dans l’opposition que la génération Y par exemple. Certains de ces mots reviennent régulièrement comme OKLM (“au calme”), TRQL (“tranquille”) ou POSEY (“posé”). Ils sont dans l’apaisement parce qu’ils ont vu trop d’excès entre les attentats, la pandémie, la guerre en Ukraine et l’écoanxiété. »

Quel est le poids d’Internet dans la communication entre ados et adultes ?

« Le tournant majeur dans le fonctionnement et le discours des jeunes remonte à 1995 : l’apparition d’internet, indique le docteur Revol. Avant, lorsque l’on nous disait quelque chose, c’était comme cela et pas autrement, il n’y avait que peu de moyens de se renseigner. Maintenant, tout est vérifiable dans l’instant. La transmission de l’information n’est plus verticale et descendante, ce ne sont plus les profs, les experts, les médecins, les parents qui donnent directement la bonne parole, il suffit d’aller voir sur internet. »

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Quand le rap nourrit le vocabulaire

Parmi les influences qui modulent le langage des ados lyonnais, le rap occupe une place majeure. Et ce n’est pas Okis qui dira le contraire. « Je suis un peu le cliché du Lyonnais, fier de sa ville, qui peut pas s’empêcher d’en parler quand il va ailleurs », lance l’artiste. Passé il y a quelques années par Tribune de Lyon comme journaliste, il analyse désormais sa ville de l’autre côté du micro, notamment avec son titre Pélo 2 Ville.

« Le terme “pélo” est devenu une vitrine, remarque l’artiste, tout le monde sait que c’est Lyonnais mais on commence à l’utiliser ailleurs. Maintenant je trouve que le mot le plus symptomatique de l’argot lyonnais c’est la “rouille”. “Rouiller”, c’est bien un concept typiquement lyonnais et pas encore très répandu », rappelant ces longs étés étouffants où même la rue de la Ré prend des allures de western.

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Pour Okis, « les jeunes connaissent le langage populaire et des quartiers grâce à la musique. Elle permet de faire le lien entre les classes sociales ». Dans une « ville de rap passée à côté du rap national », lui se démarque en utilisant un argot empli de références à son histoire, qui parlent aux Lyonnais. « Quand j’utilise ce vocabulaire dans mes sons, c’est très naturel, précise le rappeur ; j’essaye pas de chercher un public, mais je ne me prive pas non plus par peur que certains ne me comprennent pas. »

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